LA PRINCESSE ET SON PHILOSOPHE
Une mise en scène de la correspondance entre la Princesse Élisabeth de Bohême et le philosophe Descartes
Pièce de Francis Marchal (éd. Raison et passions)
avec Elsa Stirnemann et Yves Mugler
La correspondance de René Descartes et Élisabeth de Bohême
Une merveilleuse rencontre
La mise en scène, dans cette pièce, de certains moments de la correspondance entre Descartes et la Princesse Élisabeth de Bohême, traduit ce désir de faire vivre à un large public, la présence vivante sur les planches de cette rencontre entre le plus grand philosophe du 17ème siècle et une jeune femme philosophe d’une intelligence et d’une culture exceptionnelles.
L’incarnation physique d’Elsa Stirnemann et d’Yves Mugler, la richesse et la modulation des voix donnent à ce spectacle une intensité dramatique très particulière. Les tonalités des multiples registres de ces paroles, nous mettent en présence d’une intense proximité faite de la demande d’humanité provoquée par la rencontre du visage de l’autre.
ÉLISABETH DE BOHÊME
Elsa Stirnemann
Formée à l’école Parenthèses dirigée par Lucien Marchal, elle reçoit l’enseignement de Christophe Patty, de Laurence Mayor, Jacques Lassalle… et poursuit sa formation en Russie auprès de Nika Kossenkova. De retour en France, elle rejoint la Compagnie Art Métamorphoses dirigée par Mamadou Dioume, avec lequel elle crée plusieurs spectacles autour de Mishima, Tchékhov, Courteline, Koltès.
Dernièrement elle a créé sa compagnie Alchimistoire et explore le roman au théâtre avec l’adaptation d’Une passion de Christiane Singer et des textes de Christian Bobin.
RENÉ DESCARTES
Yves Mugler
Yves Mugler travaille comme comédien Voix-Off professionnel depuis 1982, pour la Radio, la Télévision et les sociétés de productions audiovisuelles.
Spécialisé dans le commentaire et la narration, il a interprété de nombreux commentaires de films documentaires, de programmes pédagogiques et de contenus multimédia, ainsi qu’une centaine de livres audio, et se produit régulièrement en public dans le cadre de lectures-spectacles.
Il a interprété Descartes dès la création de La Princesse et son philosophe.
Élisabeth de Bohême
Élisabeth de Bohême n’a pas encore 25 ans quand elle écrit, en mai 1643, sa première lettre à Descartes qui lui a 47 ans. Fille d’un roi déchu, Frédéric V, Électeur palatin qui ne put régner que quelques mois sur son royaume de Bohême, d’où son sobriquet : le « souverain d’un hiver », et d’Élisabeth Stuart, fille du roi Jacques premier d’Angleterre. Cette famille royale, proscrite de Bohême, avait dû trouver asile en Hollande à La Haye, et s’efforçait de reconstituer une vie de cour brillante, en organisant fêtes et parties de chasses joyeuses, sans se soucier de leurs finances et des créanciers qui les accostaient parfois dans la rue pour exiger le paiement de leurs dettes….
Élisabeth fut élevée, avec ses cinq frères et ses trois sœurs. Sa position d’ainée lui conférait la charge symbolique et réelle de seconder sa mère, surtout après la mort de son père en 1632.
Selon ses contemporains, sa beauté était parfaite : cheveux noirs, le teint vif, les yeux bruns et brillants, la bouche belle et vermeille, les dents admirables et le nez aquilin et menu. Cependant, en cas de forte émotion, son nez sujet à rougir, la chagrinait beaucoup, elle se cachait dans ces moments même de sa mère !
À la suite d’une excellente éducation, elle avait appris six langues dont le français. Elle pratiquait les mathématiques, la physique et suivait avec curiosité les recherches scientifiques de son époque. De plus, elle était philosophe et entretenait un fort attrait pour la politique.
René Descartes
René Descartes, philosophe déjà grisonnant, au moment de leur première rencontre à La Haye en 1642, partageait avec elle le sentiment de l’exil, même si celui-ci restait choisi pour lui et forcé pour elle.
Sa volonté de résider hors de France depuis une quinzaine d’années, résultait d’un besoin de vivre et de philosopher plus librement dans ce lieu — la Hollande, qu’il espérait plus paisible et plus tolérant.
Avec ses publications à partir de 1637 du Discours de la méthode, puis des Méditations métaphysiques en 1641 et des Principes de la philosophie en 1644 — dédicacés à la Princesse Élisabeth — notre philosophe avait déjà produit l’essentiel de ses découvertes philosophiques et scientifiques. Il était connu, reconnu et parfois aussi dénigré dans toute l’Europe savante de l’époque.
Une amitié d'exception
Tout se passe comme si chacun des deux personnages se trouvait dans un moment de sa vie, et de son œuvre pour le philosophe, où cette rencontre avec l’Autre était devenue ce qui ne pouvait pas ne pas avoir lieu.
Parce que c’était elle, parce que c’était lui, cette pièce nous donne à voir l’histoire d’une exceptionnelle amitié. Cependant, derrière les harmoniques d’une si parfaite proximité, se profile aussi de manière insidieuse mais insistante, les signes prémonitoires d’une fatale séparation.
Pour Descartes, ce moment de sa vie correspond à de vaines et féroces polémiques avec des théologiens d’Utrecht, et aussi à d’incessants débats et à de violentes querelles causés par la nouveauté de ses idées.
Élisabeth représente à l’opposé, la figure de la correspondante exemplaire, qui non seulement cherche véritablement à comprendre son philosophe, mais le conduit par ses questions et remarques critiques à approfondir et à modifier ses idées.
De plus, très vite, s’installe entre eux une profonde amitié, d’autant plus vive qu’elle surgit malgré les exigences d’une relation sociale très corsetée…
Enfin, on peut être philosophe, mais néanmoins homme : que devons-nous penser du compliment qu’il lui adresse le 21 mai 1643 : « J’aurais eu trop de merveilles à admirer en même temps voir sortir des discours plus qu’humains d’un corps si semblable à ceux que les peintres donnent aux anges ». Serait-il impensable qu’il se fût épris d’une « personne incomparable » qui, par surcroît, entendait sa philosophie à merveille ?
Pour Élisabeth, cette période correspond aussi à de très douloureuses épreuves en relation avec les mésaventures et les drames des membres de sa famille. Calviniste convaincue, elle éprouve un violent déplaisir de voir son frère Edouard se convertir en 1645 par pur opportunisme au catholicisme à l’occasion de son mariage.
Plus grave, un an après, un scandale éclabousse sa famille : sa sœur la Princesse Louise — Hollandaise ayant été « séduite » par le comte de l’Epinay, après un duel manqué, celui-ci est assassiné, par des hommes de main à la solde d’un autre frère d’Élisabeth, le prince palatin Philippe !
La réputation de la famille palatine tout entière étant compromise, Élisabeth doit alors quitter la Hollande. Autre drame à peine pensable, son oncle maternel, le roi Charles premier d’Angleterre, sera décapité publiquement à Whitehall, à Londres, en 1649.
Descartes va vite devenir son philosophe et son meilleur médecin : l’interlocuteur privilégié d’une sorte de liaison thérapeutique. Élisabeth n’hésite pas à lui confier ses faiblesses, les symptômes de son tempérament mélancolique, et elle se félicite des remèdes proposés. Grâce à lui elle est plus heureuse : en 1645, elle lui confie : « Je prends goût à la vie depuis que j’ai le bonheur de vous connaître ».
Extraits vidéo
Lecture donnée au Centre Sèvres de Paris, le 22 mars 2019
Durée = 6 minutes | Captation réalisée par Franck Rethore
L'auteur
Francis Marchal, professeur de philosophie, ne cesse de croire que « la philosophie n’est pas un temple mais un chantier ». Bien loin que cette activité soit réservée à quelques-uns, elle peut et doit devenir l’affaire de tous.
En dirigeant et publiant L’enseignement de la philosophie à la croisée des chemins, puis en participant à des groupes de réformes ministérielles des programmes d’enseignement de cette discipline et, en étant membre fondateur de l’Association pour la Création d’Instituts de Recherche sur l’Enseignement de la Philosophie – ACIREPH, il n’a cessé de s’efforcer de mettre en pratique cette volonté de partage et de mise en commun.
Auteur d’un Descartes lecteur de Machiavel, il vient de publier en collaboration avec Jean-Jacques Guinchard, une édition nouvelle du Discours de la méthode de Descartes, avec une préface d’Emmanuel Faye (éd. Raison et Passions, août 2018).
Avis sur la pièce
La correspondance entre Descartes et la Princesse Élisabeth est fondamentale à au moins deux titres. D’une part, elle donne à voir un Descartes incarné, qui traite des relations entre une âme et un corps soumis aux affres de la maladie, entre des hommes pas toujours raisonnables tentant de vivre ensemble, ou bien encore, des moyens dont nous disposons pour faire nous-même notre bonheur. D’autre part, elle révèle la personnalité hors du commun d’une souveraine cultivée en recherche d’une philosophie pratique.
La démarche de Francis Marchal dans La Princesse et son philosophe rend parfaitement justice à ces deux dimensions de cet échange unique dans l’histoire de la philosophie. En donnant chair et voix à Élisabeth et à Descartes, elle les rend vivants, pour le plus grand bénéfice des spectateurs.
Nous ne pouvons donc que nous féliciter d’une telle initiative et formuler à son endroit les plus vifs souhaits de succès et de pérennité. »Une mise en scène en théâtre élégante et judicieuse.Delphine Antoine-Mahut (Professeure de philosophie, École Normale Supérieure de Lyon, spécialiste de Descartes)
L’Auteur, professeur de philosophie, se propose non seulement de faciliter l’accès à un échange de lettres à « l’intérêt philosophique » indiscutable, mais aussi de rendre sensible « l’intensité » de la « rencontre humaine » entre Élisabeth et Descartes, dont cette correspondance est l’occasion. Il poursuit donc un objectif de vulgarisation intelligente. […] Les choix faits en matière linguistique permettent d’entrer facilement dans le texte et, si la volonté de mise en intrigue de ces lettres a conduit à quelques modifications de langage et à des ajouts par rapport au texte initial, ces ajouts sont relativement peu nombreux. On ne peut que se réjouir que cette pièce ait déjà été jouée.
Élodie Cassan (Bulletin cartésien XLVII, 2018 / Archives de philosophie)
Cette correspondance qui a prêté à de si nombreuses études, parfois romancées, n’avait jamais été mise en théâtre comme l’ont été les Méditations où la rencontre avec Pascal. C’est chose faite grâce à La Princesse et son philosophe, de manière d’autant plus élégante et judicieuse qu’elle se tient au plus près des textes. J’ai pris beaucoup de plaisir à sa lecture et espère que cette sorte de pièce donnera lieu à toute une série de productions.
Denis Kambouchner (Professeur de philosophie à Paris 1 Panthéon-Sorbonne, spécialiste de Descartes)
La correspondance entre Descartes et la princesse Élisabeth constitue un des sommets de la philosophie de l’Age classique. Rédigé dans une langue magnifique, cet échange donne un aperçu à la fois abordable et profond de la pensée de Descartes, en insistant, mieux que des œuvres plus canoniques comme le Discours de la méthode ou les Méditations métaphysiques, sur ses dimensions concrètes, éthiques, existentielles. Cet échange met aussi en valeur l’attachant personnage d’Élisabeth, une des rares figures féminines de la philosophie classique.
La forme dialogique de cette correspondance se prête particulièrement à une mise en scène théâtrale adaptant ces textes. C’est ce que Francis Marchal a réalisé avec habileté et compétence dans La Princesse et son philosophe.
Les éléments qui précèdent suffisent à suggérer tout l’intérêt intellectuel, littéraire et pédagogique de ce travail, dont je me réjouis.Denis Moreau (Professeur de philosophie à l’Université de Nantes, spécialiste de Descartes)
Contact & Diffusion
Francis Marchal : 06 11 77 50 36